La boîte originale de la version
Descartes de 1987.
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Les Demeures de l'Epouvante est un jeu intimiste, presque "cocooning" si j'ose dire comparé à Horreur à Arkham... Là où le premier s'attarde sur un bâtiment, le second permet de prendre part à une grande aventure dans une, voir plusieurs villes gigantesques, les villes propres à l'univers de Lovecraft (Dunwitch, Innsmouth, Arkham...etc).
Horreur à Arkham est, à l'origine, un jeu édité par Descartes en 1987. Nous parlerons ici de sa réédition orchestrée par FFG/EDGE, éditée en 2006.
Cette réédition a été mise au point par Kevin Wilson, oui LE Kevin Wilson, auteur de Descent V1... Ce passionné a la réputation de toujours faire des jeux monstres, aux systèmes ultra-complet (trop ?), indigestes, mais pourtant bien plus immersifs et passionnants que les autres pour quiconque se donne la peine de s'y plonger.
Voilà la boîte de la réédition de 2006 par FFG/EDGE.
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Horreur à Arkham ne fait pas exception à cette règle : à la première lecture des règles, on est quelque peu déboussolé, et on se dit qu'il va falloir revenir souvent les consulter en cours de partie... S'il faut bien 2-3 parties pour vraiment apprivoiser le système, bizarrement il tourne vraiment bien par la suite et s'avère fluide et très immersif... On se prend clairement au jeu car la tension est constante, et les retournements de situation nombreux.
Y A QUOI A VOIR
A ARKHAM ?
Horreur à Arkham est un jeu d'ambiance, jeu de plateau pur qui se déroule dans la ville d'Arkham (mais ça vous vous en doutiez déjà).
Le jeu se joue de 1 à 8 joueurs (et croyez-le ou non, le jeu en solo est tout aussi passionnant qu'en groupe !). Vous incarnez un investigateur qui se retrouve plongé dans une course contre la montre pour tenter d'empêcher le réveil d'un grand ancien qui détruira la ville d'Arkham, voir le monde. Des portails dimensionnels s'ouvrent dans la ville, faisant apparaître des monstres en pagaille qui grandissent la puissance du grand ancien, augmentant le risque de son réveil. Vous devez retarder son arrivée, voir même l'empêcher. Comment ? En scellant les portails dimensionnels avant qu'il ne soit trop tard... Si jamais il est trop tard et que le grand ancien se réveille, il vous faudra l'affronter dans un combat épique très hollywoodien.
Comme pour les Demeures de l'Epouvante, le jeu se déroule dans les années folles à grand renfort de gangsters, détectives et autres starlettes...
Le jeu propose d'affronter plusieurs grand anciens (boss de fin de niveau en quelque sorte), chacun influençant le déroulement du jeu via des règles spéciales. La boîte de base contient 8 grands anciens dont le grand Cthulhu en personne !
Au début de la partie, on pioche un grand ancien au hasard (pour la première partie on prendra automatiquement YIIG) puis ensuite on passe à la mise en place du jeu... Et là, comme tous les jeux FFG/EDGE et encore plus les "Kevin Wilson's Games", il y a du taff !
TABLE DE JEU :
Alors sortez illico votre table de ping pong, ou la table des banquets d'Astérix, car il va vous falloir de la place...
Déjà, rien qu'à voir la taille du plateau en 6 grands volets, ça en dit long... Mais la table ne se limite pas à ça : reste les avalanches de cartes et autres jetons qui vont venir inonder le peu d'espace libre qu'il reste sur votre surface de jeu.
Jugez plutôt avec cet exemple de mise en place du livre de règles.
Ensuite, les joueurs choisissent des investigateurs... Il y en a une sacré floppée : 16 au choix... On retrouve certains d'entre eux dans les Demeures de l'Epouvante. En fait, FFG fait ce qu'il a déjà fait avec Descent V1 : amortir ces dépenses créatives. En effet, Descent a donné naissance à Runewars et Runebound où l'on retrouve un paquet des illustrations et de la charte graphique de Descent V1, de plus ces 3 jeux se déroulent dans le même univers... Ils ont adopté cette politique pour Horreur à Arkham, les Demeures de l'Epouvante, l'Appel de Cthulhu JCE (jeux de cartes à collectionner) et Le Signe des Anciens. Cela permet de créer un effet de collection auquel aucun Geek ne pourra résister.
Chacune des fiches Investigateurs indique ce qu'il faut préparer : chaque investigateurs dispose de compétences représentées par des cartes à piocher au hasard (comme dans Descent V1 !). Ces cartes se présentent sous la forme de mini-cartes réparties en plusieurs catégories : objets communs, objets uniques, compétences, sorts et alliés.
Les cartes Objets Communs
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A chaque partie, même si l'on reprend le même Investigateur, il sera donc différent grâce à ce système de pioche aléatoire.
Ensuite, il y a des paquets de grandes cartes avec des dos de couleur différente. Chaque couleur fait référence à l'un des quartiers de la ville d'Arkham. Lorsqu'un Investigateur se rend dans un lieu du plateau, il doit piocher une carte de couleur correspondante et se référer au lieu dans lequel il se trouve : chaque carte traîte de trois lieux différents du quartier.
Il doit alors lire le texte et suivre les instructions. Ces simples cartes ajoutent un côté narratif, roleplay, présentant des choix et des tests de caractéristiques à effectuer pour gagner des choses, ou éviter d'en perdre.
AU TOUR DU JEU :
Une fois que tous les Investigateurs ont joué, c'est au tour du MJ (le Jeu), car dans Horreur à Arkham, c'est le jeu lui-même qui prend la place du Maître de Jeu grâce à des tours de jeu automatisés générés par un paquet de carte appelé les "Cartes Mythes".
Ces cartes se lisent de bas en haut. A gauche se trouve le symbole du lieu où un portail va s'ouvrir. Les symboles à droite de ce symbole indiquent quels monstres vont se déplacer sur le plateau pour ce tour. Enfin, il y a un texte qui indique certaines règles spéciales qui s'appliqueront durant toute la durée du prochain tour des investigateurs, ou plus simplement un évènement immédiat à résoudre. La carte indique également où va apparaître un pion indice.
Les pions indice servent à sceller les portails une fois qu'ils ont été fermés, mais ils peuvent aussi servir à forcer la chance lors d'un jet de dés malheureux par exemple, et tenter de rattraper le tir en relançant un dé par pion indice dépensé.
En ce qui concerne le déplacement des monstres, cela est géré de manière très intelligente. En reprenant la carte Mythe présentée ci dessus, on distingue le symbole "+" sur un fond blanc : cela signifie que tous les monstres qui possèdent un symbole "+" sur leur pion, vont se déplacer en suivant les flèches blanches, et tous les monstres avec le symbole lune vont se déplacer en suivant les flèches noires (fond noir derrière le symbole lune de la carte Mythe). Sur le plateau, on peut distinguer des flèches blanches et noires qui illustrent les déplacements des monstres.
Quand le jeu indique qu'un monstre apparaît, il faut piocher au hasard un pion monstre et le placer sur le plateau de jeu. Ce pion indique tout ce qu'il faut savoir pour toutes les actions tentées contre ce monstre, ou celle qu'il tentera lui-même (attaque spéciale, modificateur aux tests d'horreur et d'évasion, nombre de points de dégâts occasionnés lors d'une attaque réussie, capacités spéciales ...etc). De plus, les monstres sont classées en différents types représentés par la couleur différente de leur contour ; monstres volants en bleu, monstres normaux en noir...etc.
QUELLES SONT NOS OPTIONS ?
Horreur à Arkham ne contient pas de figurines : à la place, nous avons des pions cartonnés sur socles. Cela a son avantage : pas de peinture à faire ! A noter que toutes les figurines des Demeures de l'Epouvante sont compatibles avec le jeu.
Les Investigateurs ont de nombreuses options lors de leur tour : ils peuvent se déplacer de lieux en lieux, pour tenter de fermer des portails, visiter des lieux, échapper à des monstres, effectuer des achats, récupérer des indices...etc. Chaque lieu a son intérêt, et sur le plateau sont indiqués les choses que les Investigateurs sont succeptibles d'y trouver... J'ai bien dit succeptible, car ce n'est pas parce qu'on se rend dans un lieu où l'on pourrait trouver des sorts, qu'on va forcément en dénicher, ou alors en dénicher sans bobo, car Horreur à Arkham est un jeu vache, ou plus on avance et plus on en bave !
En plus des pions indice, il existe une chose très maline pour contourner un peu la malchance : on peut modifier les profils des investigateurs à chaque début de tour.
Chaque Investigateur possède un score de concentration : celui-ci indique de combien de case on peut bouger un pion coulissant de compétence par tour. Chaque investigateur possède 3 de ces pions et chacun d'eux englobe 2 caractéristiques. Ainsi si l'on en augmente une, l'autre diminue : par exemple, si l'on augmente de 1 point la discrétion, on diminue de 1 point la vitesse, ce qui semble logique au final. Il est donc très important de planifier son tour d'avance et d'ajuster au mieux ses caractéristiques.
FERMER LES PORTAILS :
Pour gagner, les Investigateurs devront fermer et sceller tous les portails dimensionnels avant le réveil du Grand Ancien : celui-ci dispose d'une échelle du destin sur sa fiche respective ; à chacun des tours du jeu, on ajoute un pion Destin sur cette échelle. Lorsqu'on place le dernier pion Destin sur cette échelle, le Grand Ancien se réveille.
Heureusement, il existe des moyens de retirer des pions Destin de cette échelle, en particulier en scellant des portails.
Lorsqu'un portail s'ouvre, on pioche au hasard un pion Portail parmi la pile des jetons, et on le place face caché sur le lieu indiqué par la carte Mythe. Une fois qu'un Investigateur se rend sur le lieu d'un portail, il est aspiré par celui-ci vers une autre dimension. En retournant le pion portail, on saura dans quel dimension l'Investigateur est projeté.
Il devra alors traverser cette dimension et affronter ces dangers (en piochant des cartes comme pour les lieux), une fois revenu de l'autre monde, le portail sera fermé, il devra alors le sceller pour rendre le lieu sûr et empêcher tout portail de s'ouvrir ici pour le reste de la partie.
Pour sceller un portail, un investigateur peut :
- soit dépenser 5 pions indice,
- soit utiliser un signe des anciens, s'il en possède un.
Puisqu'un portail s'ouvre tous les tours (en théorie, car certains lieux scellés empêche leur apparition pour de bon), il va sans dire qu'une course contre la montre s'engage et que chaque tour est compté.
ANIMATION DANS LA VILLE :
Sur le plateau, il y a une échelle de terreur. On déplace le pion terreur sur cette échelle lorsque les monstres présents sur le plateau sont trop nombreux ou si une carte le stipule. Une fois que cette échelle atteint certains paliers, des boutiques ferment, des gens désertent la ville en proie à la panique. Il va sans dire qu'une fois privé des bienfaits de certaines boutiques, le combat des Investigateurs va rapidement se compliquer.
A noter aussi que les Investigateurs pourront contracter des emprunts à la banque d'Arkham (ce qui n'est pas sans risque), obtenir des acomptes, rejoindre les forces de police afin de disposer d'un véhicule, devenir membre d'organisations, obtenir une aide d'alliés... Bref, véritablement vivre au sein de la ville d'Arkham, même en ces temps troublés.
POUR LES HARDCORE GAMERS...
Horreur à Arkham est un jeu très dense qui est composé de séquences de jeu dont il faut scrupuleusement respecter la chronologie : ça fait pas mal de par cœur à apprendre, même si le dos du livret de règles rassemble un résumé des tours de jeu et des choses importantes, et ça on apprécie.
Il y a cependant un "je ne sais quoi" de pas très digeste dans ce jeu, non pas que sa mécanique soit lourde, mais peut-être un peu trop précise, bien que non dénuée d'abstractions propres à tout jeu de plateau.
Les règles du jeu sont très bien illustrées, très claires et bien hiérarchisées ce qui rend leur lecture agréable, ce qui est indispensable car on se replonge souvent dedans au cours des toutes premières parties.
On déplorera un manque d'interactions entre les différents investigateurs : on ne peut par exemple pas combattre de monstres en groupe... Cela conforte mon idée qu'Horreur à Arkham est un jeu qui se prête à merveille au jeu en solitaire car on a vraiment l'impression de prendre part à une grande aventure racontée à la façon des "Livres dont vous êtes le Héros".
Horreur à Arkham est indéniablement pour les gros joueurs : notre première partie a durée 7 heures, et en plus on a perdu ! Ma deuxième partie, en solitaire, a duré environ 4 heures et là j'ai gagné.
Notez que le jeu dispose de nombreuses, très nombreuses extensions : certaines permettent de rajouter une zone de ville au plateau (ville d'Innsmouth, Dunwitch...etc), rajoute son lot de cartes, bref de quoi transformer cette énorme boîte de base en monde miniature à explorer... Sachez que la boîte de base promet déjà de très nombreuses parties toutes très différentes grâce au nombre incroyable de cartes qu'elle contient.
Un très grand jeu, véritablement passionnant à ne pas mettre entre toutes les mains !
Pour en savoir plus, vous retrouverez les règles expliquées en vidéo ici.